Le comité social et économique peut ordonner des expertises, notamment dans le cadre des trois consultations récurrentes. L’expert peut alors demander l’accès à un certain nombre d’informations détenues par l’employeur, ce qui ne va pas sans créer du contentieux. Quelques exemples dans cet article.
Les documents devant être remis à l’expert : règles générales
L’article L.2315-83 du Code du travail énonce que « l’employeur fournit à l’expert les informations nécessaires à l’exercice de sa mission ».
L’article R.2315-45 du même code précise que « l’expert demande à l’employeur, au plus tard dans les trois jours de sa désignation, toutes les informations complémentaires qu’il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L’employeur répond à cette demande dans les cinq jours ».
Il arrive que les employeurs tentent d’opposer la nature confidentielle des informations afin d’éviter une transmission à l’expert.
Or, ce dernier au même titre que les élus du comité social et économique, est soumis à une obligation de secret et de discrétion.
Le chef d’entreprise ne peut alors se retrancher derrière cet argumentaire pour refuser de communiquer les informations demandées par l’expert.
L’étendue ainsi que le contenu des informations devant être transmises à l’expert-comptable sont largement précisées par la jurisprudence, au cas par cas.
Les documents devant être remis à l’expert : précisions jurisprudentielles
D’une manière constante, la Cour de cassation estime que l’expert-comptable est seul à apprécier les documents qu’il estime utiles afin de mener à bien sa mission d’expertise.
Néanmoins, malgré cette approche favorisant à juste titre les experts, il arrive que la Haute juridiction pose certaines limites.
Par exemple, une décision en date du 9 mars 2022 (Cass. soc., 9 mars 2022, n° 20-18.166), est venue préciser que l’expert-comptable ne peut exiger la production de documents qui n’existent pas et dont l’établissement n’est pas obligatoire pour l’entreprise.
L’employeur ne peut donc, en aucun cas, être mis dans l’obligation de créer ces documents inexistants à la demande de l’expert-comptable et ce, peu important qu’il dispose des informations permettant leur création.
Cependant, l’expert-comptable peut demander la production d’informations qui ne sont pas contenues dans la base de données économiques sociales et environnementales (BDESE).
Illustration avec un arrêt du 18 mais 2022 (Cass. soc., 18 mai 2022, n°20-21.444)
En l’espèce, un CSE désigne un expert afin de l’assister lors de la consultation annuelle sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi. L’employeur transmet les informations relatives à cette consultation et contenues dans la BDESE. Le comité social et économique demande alors à l’employeur la communication au cabinet d’expertise de certaines informations complémentaires « brutes », « prises à la source ».
Ces éléments, comme relevé par la cour d’appel, devant permettre une analyse complète sur 20 % de la population exclue des données fournies par l’employeur, en matière de promotion, de qualification et d’égalité professionnelle entre hommes et femmes, et ce sur la totalité du périmètre social, alors que l’agglomération des données produites par la société, est susceptible de fausser l’analyse notamment en gommant les écarts de salaire qui pourraient s’avérer importants dans ces catégories professionnelles ainsi que les changements annuels de ces populations de cadres.
L’entreprise s’y refuse, mais la cour d’appel se prononce en faveur du CSE.
La Cour de cassation considère alors que la cour d’appel a légalement justifié sa décision, peu important que les informations demandées ne soient pas au nombre de celles devant figurer dans la base de données économiques et sociales en application des articles du Code du travail.
Ainsi, l’entreprise se voit contrainte de communiquer à l’expert des informations brutes existantes mais synthétisées ou non intégrées dans la base de données afin que l’expertise s’avère la plus qualitative possible.